25/04 - 22/06
"AURIS MARIS, AURIS TERRAE"
Résumé de la résidence d’Anne Le Mée 2013/2014 à L’Atelier de la Gare
La résidence à l'Atelier de la Gare se juxtapose avec un travail de collaboration et de recherche avec des scientifiques et artistes (biologiste, ethnologue, artiste sonore...) associés au LEMAR (pôle de recherche transdisciplinaire sur le milieu marin, Université de Bretagne Occidentale et CNRS, situé à Plouzané et Brest, Finistère).
Anne Le Mée a parcouru le territoire proche de Locminé et plus particulièrement les installations mégalithiques qui témoignent d'une relation tout autre à la nature. Avec l'écoute et le voyage dans cette trame, Anne Le Mée propose une sculpture monumentale, immergeant le spectateur dans un mouvement d'exploration, à la fois physique et intime, catalyseur d'une mémoire ancienne située dans le cerveau droit.
Interface internet "AURIS MARIS, AURIS TERRAE" à suivre pendant l'exposition.
Collaborations :
*Christine Paillard, DR2 CNRS, Biologiste
Thème "Ecologie et évolution des interactions virus-bactéries-eucaryotes"
Laboratoire des sciences de l'environnement marin, LEMAR
UMR CNRS 6539 Institut Universitaire Européen de la Mer, Plouzané.
*Fabien Riera, Anthropologue
C.R.B.C. / Ecole Doctorale des Sciences Humaines et Sociales, U.B.O. de Brest
Ingénieur d'Etude, LEMAR – IUEM (Institut Universitaire Européen de la Mer)
**Hugues Germain, Artiste plasticien sonore, électro-acousticien, Brest http://volumecollectif.free.fr/hughes/index.html
Présentation de l'exposition
Le titre de l'exposition "Auris Maris, Auris Terrae", fait référence aux deux axes sous-jacents de la résidence : l'écoute du territoire terrestre étant le volet consacré à Locminé, celle du territoire marin - en collaboration avec le LEMAR- prenant l'ormeau comme sujet d'étude et point de départ pour questionner les enjeux du réchauffement climatique.
Pour Anne Le Mée, l'ormeau est une belle « caisse de résonance », à la fois par la forme de sa coquille et par sa capacité à faire se rencontrer aujourd'hui art et sciences, hier mythes et traditions. Animal marin collé au rocher et capable d'en percevoir toutes les vibrations même les plus infimes, l’artiste voit en lui une prolongation naturelle de son intérêt pour l'eau et les vibrations sonores ou infra-sonores.
Descriptif de l'exposition
Pièce 1
Un labyrinthe constitué de pièces d’acier imbriquées, est surmonté de deux boussoles en cuivre suspendues.
La forme du labyrinthe est inspirée à la fois du labyrinthe crétois et des dessins du Tumulus de Gavrinis.
Le labyrinthe crétois est répandu partout dans le monde et son tracé est très ancien. Contrairement à beaucoup de labyrinthes plus récents, le « centre » est légèrement décalé dans le dessin. Son parcours fait passer près du centre alternativement dans un sens puis dans l’autre : de cette façon, le marcheur décrit des oscillations qui le font changer d’orientation à chaque extrémité des courbes.
L’expérimentation de son parcours mais aussi, dans une moindre mesure, de son tracé, permet de relier les deux hémisphères cérébraux.
Le labyrinthe présenté ici est formé par l’intersection de deux labyrinthes de ce type avec chevauchement de certaines courbes. Il n’a donc ni centre unique, ni entrée, ni sortie.
Le visiteur est invité à franchir ses limites à n’importe quel endroit et à le parcourir pour en expérimenter les effets. Les pieds peuvent suivre deux courbes parallèles.
La duplication des volutes de deux labyrinthes est inspirée de certains dessins observés à Gavrinis qui présentent une symétrie haut/bas ou encore droite/gauche.
A la verticale des points nodaux les boussoles réagissent en changeant très subtilement d’orientation lorsqu’un visiteur se positionne en dessous. Elles amorcent au bout d’une minute un mouvement rotatif, jusqu’à ce que la torsion exercée sur le fil par le mouvement soit d’une force supérieure à celle du champ magnétique de la personne. Alors la boussole revient à sa position initiale ; si la personne demeure au même endroit, la boussole effectue un mouvement de va et vient résultant de ces deux forces.
Cette « sculpture plate » agit sur le corps en proposant une désorientation avec des mouvements oscillants ; par le simple fait de changer d'orientation à plusieurs reprises, l'oreille interne et plus précisément la partie consacrée à l'équilibre (les "canaux semi-circulaires") est très fortement sollicitée. Puis, immobile sous une boussole, une réorientation verticale du corps s’affine, grâce à l’écoute de mouvements subtils, internes et lents.
Pièce 2
Une sculpture monumentale (plaques d'acier, bois, installation sonore)
Sa forme évoque l’arrivée au centre d’un labyrinthe repris en volume et agrandi à l’échelle humaine. Cette sculpture s’inspire principalement des parcours effectués dans les dolmens et menhirs des environs de Locminé.
Les plaques d'acier verticales et horizontales sont solidaires entre elles et immobiles. L'ensemble se tient par tenségrité. L'entrée qui demande de se pencher comme dans de nombreux dolmens, mène par un demi-cercle dans un vestibule plus vaste. Le sol y est bombé ; sous ce renflement se trouvent les enceintes diffusant des sons enregistrés pendant le parcours et autres sons en rapport avec la terre (éboulis, séismes…) et le minéral.
La sculpture reprend quelques principes observés dans les mégalithes tels que les agencements en guingois des orthostates qui ne doivent rien au hasard car elles structurent l'espace de façon très précise, une salle circulaire, une paroi parfaitement verticale au fond du dolmen et contre laquelle on a naturellement envie de s'appuyer.
Dans la sculpture, les repères spatiaux habituels sont annulés (d’où une sensation de tournis ou de déséquilibre chez certaines personnes) ce qui focalise l’attention sur la perception de l’espace et l’écoute.
La couleur noire fait référence à quelque chose de caché, de profond, de tellurique comme le son le confirme. Cette sculpture a quelque chose de « chtonien », lié aux profondeurs de la terre et à sa formation ancienne. Contrairement à l’attente que le couloir d’entrée pourrait solliciter, elle ne présente rien sinon le vide.
Ces deux sculptures s’inscrivent dans un ensemble plus vaste intitulé Auris Maris, Auris Terrae, le volet Auris Terrae (Oreille de terre) étant présenté ici.
Pendant la durée de l’exposition, un site Internet témoigne de façon évolutive des recherches effectuées, qui aussi bien ont pu nourrir ces réalisations que les prochaines liées au volet Auris Maris (oreille de mer). http://annelemee.free.fr/
Le travail d’Anne Le Mée est le résultat d’une lente immersion dans un lieu, un paysage ou encore un contexte. Le temps d’écouter et d’expérimenter physiquement, jusque dans l’intimité physiologique, ce que ces environnements lui racontent. En retour, elle propose des expériences, des sensations spécifiques, le plus souvent liées à des phénomènes naturels.
Pour elle, le corps est le véhicule de la connaissance, et le cerveau n’en est que l’interprète dans un second temps. Elle s’est beaucoup intéressée aux mégalithes dans la mesure où, selon elle, ils sont bâtis pour le corps et sa mémoire spécifique, une mémoire immanente dont le savoir ne vient pas de l’extérieur.
« Je considère les mégalithes comme des sculptures à part entière dans la mesure où ils permettent de modifier la pensée, et c'est bien ce que je recherche à travers la sculpture : un effet physiologique se produit sur le "spectateur". Les mégalithes sont selon moi des organes d'écoute à part entière qui relayent - entre autres - des "informations" sur le paysage; ils s'adressent au cerveau droit et au sensible, au charnel même dans la mesure où ils font revenir au présent du corps. "Branchés" sur la terre, les mégalithes reçoivent toutes les basses fréquences audibles et inaudibles (aujourd'hui beaucoup de bruits de routes, de fermes ou d'usines).
La sculpture réanime cette sensation "brute" et primitive, une compréhension directe des choses par les cellules et l’intégrité du corps". Anne Le Mée
Vue d'ensemble
Montage de l'exposition